Manger au rythme des saisons : les bénéfices concrets pour votre assiette et votre territoire

03/06/2025

Un choix simple, des impacts multiples

Privilégier les fruits et légumes de saison apparaît, pour beaucoup, comme un simple réflexe dicté par le bon sens. Pourtant, derrière ce geste en apparence ordinaire, se cachent des conséquences profondes sur notre santé, notre environnement, mais aussi sur l’économie de nos territoires ruraux. À travers le regard des producteurs, vignerons et artisans qui animent les Boutiques de Bergerac, voici pourquoi s’alimenter au rythme naturel du calendrier fait la différence.

Des aliments plus riches, plus sûrs, plus savoureux

Qualités nutritionnelles décuplées

Quand un fruit ou un légume est cueilli à maturité, respectant son cycle naturel, il concentre davantage de vitamines, de sels minéraux et d’antioxydants. Une étude de l’INRAE (Institut National de Recherche pour l’Agriculture, l’Alimentation et l’Environnement) a montré que certains légumes, tels que les épinards ou les brocolis, voient leur teneur en vitamine C chuter de 30 à 50 % lorsqu’ils sont récoltés hors saison puis transportés sur de longues distances (“Valeurs nutritionnelles des fruits et légumes : influence des modes de production”, INRAE, 2019).

À l’inverse, des carottes ou des fraises cultivées et consommées en plein cœur de leur saison affichent des qualités gustatives et nutritionnelles nettement supérieures. Cela se traduit concrètement : une fraise française du mois de mai contient sensiblement plus de vitamines et de sucre naturel qu’une fraise importée en janvier, souvent cueillie avant maturité pour supporter le transport.

Des saveurs retrouvées

Le goût, c’est justement ce qui nous réunit autour du produit local et saisonnier. Les témoignages de chefs — mais aussi d’amateurs de cuisine — abondent : un produit mûr, fraîchement cueilli, possède un profil aromatique pleinement développé. La tomate de pleine saison exhale une richesse et une longueur en bouche que ne peuvent égaler les fruits d’hiver, souvent conditionnés sous serre et issus de variétés calibrées pour le transport.

Moins de résidus indésirables

Manger de saison, c’est aussi réduire l’exposition à des traitements chimiques. Hors saison, il faut compenser l’absence de conditions naturelles par l’usage accru de fongicides ou de pesticides. Selon l’EFSA (Autorité européenne de sécurité des aliments), le taux de résidus de pesticides dépasse deux fois plus fréquemment les limites européennes sur les produits importés en contre-saison que sur les produits locaux de saison.

Davantage d’écologie dans l’assiette : un geste concret pour la planète

Réduire l’empreinte carbone de son alimentation

Le transport des fruits et légumes, même s’il représente en France “seulement” 11% des émissions de CO₂ liées à leur production (ADEME, 2023), reste fortement corrélé aux achats hors saison. Pour offrir des courgettes en décembre ou des melons en mars, il faut recourir à des trajets aériens ou routiers longue distance, souvent depuis l’hémisphère sud. Un kilo de tomates venues du Maroc aura ainsi parcouru près de 2 000 kilomètres avant d’atteindre la table d’un consommateur du Périgord. C’est bien plus que la production locale ou régionale, qui limite à la fois le transport, la logistique et le stockage frigorifique.

  • La production et la distribution de 1 kg de fraises espagnoles en début de printemps génère près de 5 fois plus de gaz à effet de serre que son équivalent local en saison (Source : Agence de la Transition écologique – ADEME).
  • En 2022, 44% des fruits consommés en France étaient importés (Agreste, Ministère de l’Agriculture).

Préserver les ressources naturelles

Parce que le calendrier respecte les cycles naturels, il permet de faire avec ce que la terre et le climat offrent à l’instant T, sans recours massif à l’irrigation ou au chauffage sous serre. D’après le CNRS, produire un kilo de tomates sous serre chauffée consomme 8 fois plus d’énergie que de les cultiver en plein champ au mois d’août. C’est également un levier pour la préservation de l’eau : les légumes de saison s’adaptent mieux à la disponibilité de la ressource sur leur territoire.

Moins de gaspillage, plus de biodiversité

Vendre des produits en phase avec les périodes de récolte limite la durée de stockage et les kilomètres parcourus. Cela réduit les pertes post-récolte, responsables de 10 à 12% du gaspillage alimentaire mondial d’après l’ONU. De plus, une agriculture saisonnière encourage le maintien de variétés locales et anciennes, souvent mieux adaptées et moins traitées, favorisant la biodiversité.

Soutenir l’économie locale et la vitalité des campagnes

Une juste rémunération des producteurs

Quand le consommateur choisit des fruits et légumes de saison issus du territoire, il encourage les circuits courts et la commercialisation directe, qui limitent les intermédiaires. Selon la Confédération Paysanne, la part du prix payé au producteur est de 60 à 70% en vente directe, contre moins de 20% en circuit long via la grande distribution. Acheter des asperges d’avril à une exploitation locale, c’est donc participer directement à la viabilité économique de fermes familiales.

Des emplois et du dynamisme sur le territoire

  • Le secteur du maraîchage emploie près de 90 000 personnes en France (Agreste, 2022).
  • En Nouvelle-Aquitaine, l’agriculture représente 1 emploi sur 12 (Région Nouvelle-Aquitaine, chiffres 2021).

Privilégier le saisonnier, soutenu par des structures comme les AMAP ou les Boutiques de producteurs, contribue à maintenir un tissu rural vivant. Cela encourage aussi la diversité des exploitations — maraîchers, arboriculteurs, petites fermes familiales — générant de l’emploi non délocalisable et des liens directs entre producteurs et citoyens.

Une alimentation plus accessible et variée

Le calendrier, un allié contre la monotonie

Contrairement à une idée reçue, manger de saison ne rime pas avec restriction : les régions françaises jouissent d’une diversité botanique qui permet de varier les assiettes tout au long de l’année. Voici, à titre d’exemple, quelques repères pour rythmer ses achats (Source : Interfel, Les fruits et légumes frais) :

  • Printemps : asperges, petits pois, fraises, radis, jeunes carottes
  • Été : tomates, courgettes, aubergines, melons, abricots, pêches
  • Automne : raisins, poires, figues, choux, potimarrons
  • Hiver : poireaux, navets, carottes, pommes, kiwis français

Cette diversité nourrit la curiosité, inspire la créativité culinaire et permet d’éviter l’épuisement de certaines cultures sur une seule saison.

Le prix du local et du saisonnier : une idée reçue à nuancer

Oublions le cliché du fruit local systématiquement plus cher. Les relevés de prix de l’Observatoire de la formation des prix et des marges montrent que les légumes “de saison” affichent en moyenne un prix inférieur de 25% à ceux importés hors période naturelle. Cela s’explique par une baisse des coûts énergétiques de production (pas de serre chauffée), une logistique allégée et l’absence de coûts d’importation.

Comment s’y retrouver ? Conseils pratiques pour consommer de saison

S’outiller pour bien choisir

  • Le calendrier des fruits et légumes : les associations interprofessionnelles (Interfel, CIVAM) proposent des versions téléchargeables ou en ligne. Elles permettent d’anticiper ses menus ou ses achats sur le marché.
  • L’origine sur l’étiquette : privilégier les mentions “France”, “Bergerac”, ou le nom du producteur, gage d’une origine directe et souvent saisonnière.
  • Les points de vente engagés : rejoindre une AMAP, fréquenter les marchés de producteurs ou les boutiques paysannes. À Bergerac, la liste et la carte des points de vente directe sont disponibles sur le site de la Chambre d’Agriculture de Dordogne.
  • Choisir les variétés traditionnelles : elles sont souvent mieux adaptées au terroir et disponibles dans leur “vraie” saison (exemple : la poire Williams d’automne, versus la poire d’importation estivale).

Adapter ses habitudes au fil du calendrier

  • Cuire, conserver, transformer : En hiver, les soupes, purées ou conserves maison permettent de profiter des récoltes de saison.
  • Découvrir de nouveaux produits : Faites la chasse aux “oubliés” : topinambour, pâtisson, ou encore la poire de moisson, redécouverts grâce à la valorisation saisonnière.

S’informer pour mieux consommer

De nombreux outils digitaux, comme l’application “Ça pousse près de chez vous” ou la carte interactive “Manger Local” du ministère de l’Agriculture, aident à trouver des producteurs proposant de la saison sur leur exploitation ou au marché.

Pour aller plus loin : changer son rapport au temps… et au territoire

Opter pour des fruits et légumes de saison dépasse la simple question de choix individuel. C’est entrer dans une démarche collective, qui replace la nature au cœur de notre alimentation. Cet ancrage saisonnier invite à redécouvrir la patience (attendre la première tomate du jardin ou la dernière pomme du verger), l’émerveillement de la diversité végétale et une consommation qui fait sens à l’échelle du paysage, du climat local et de la biodiversité.

Les bénéfices sont palpables : meilleure santé, impact carbone réduit, producteurs justement rémunérés, redécouverte de recettes traditionnelles, et restauration d’un lien essentiel entre l’homme et la terre. Plus que jamais, les saisons sont au cœur de notre avenir alimentaire et agricole. Pourquoi ne pas transformer dès aujourd’hui son assiette en un acte à la fois gourmand, citoyen et respectueux de la nature ?

Pour celles et ceux en quête de repères fiables et d’inspiration, les Boutiques de producteurs et les acteurs engagés du circuit court restent des relais précieux pour franchir le pas… ou plutôt savourer le prochain fruit mûr sur l’étal du marché !

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